Pages Capriotes
L'art de ramer vers son rêve : une barque pour Capri !
Pour les gens sérieux ou affectant de l'être, les âmes qui se flattent de manquer d'imagination, les cœurs dénués d'audace les esprits égocentriques obsédés par ce trésor que semble être leur propre personne, la vie est un chemin dénué de cailloux, une route de plaine à parcourir sans l'ombre d'un coup de folie.
Comment ensuite se plaindre de mourir d'ennui à tout moment ?
Et de lasser aussi vite que l'on se lasse ?
Il serait au contraire si simple de se laisser emporter vers un vieux rêve sans rendre de comptes à ceux qui s'estiment investis du sens de la morale et du prêt-à-penser !
N'oseriez-vous succomber à la tentation irrépressible de l'étoile rêvée, de l'inattendu : une île posée sur l'horizon et n'espérant plus que vous et vous seul ? Et au diable la dictature de ceux qui croient en savoir plus que vous sur votre propre destin !
N'oubliez-jamais cette étrange vérité : la chance qui est chatte, volage, et douée d'un humour à toute épreuve,enrichit volontiers les naïfs aventureux. Souriante, elle les comble de ses présents et les sauve de la misère après un naufrage. Souvenez-vous d'Ulysse choyé par la princesse Nausicca alors qu'il s'échoua dans l'état de nature sur la plage où cette jeune beauté et ses suivantes lavaient le linge du palais royal …
Bien longtemps après l'Odyssée, August Weber, un jeune fou, né au bord d'un lac de Bavière, et portant de façon troublante le nom du premier empereur qui succomba à l'ensorcellement de l'île divine de Capri, imita le roi d'Ithaque en ramant sans le savoir vers l'amour et la fortune !
Cet excentrique venait d'un pays où tout était froid : le climat rude de sa Bavière natale, le triste goût des amateurs d'art dédaignant ses tableaux pleins de douce fantaisie, les jeunes filles raides et hautaines repoussant ses avances, la sévérité d'un père agacé par ce rejeton frondeur et dépensier.
Comment se réchauffer alors ?
Comment résister à l'engourdissement et à la mélancolie ? En ourdissant sa fuite vers le Sud !
Vers mille huit cent quatre-vingt, on savait être impécunieux et cultivé.
L'ami August Weber se promenait partout, avec deux ouvrages bosselant ses poches trouées :
« les Promenades en Italie » du romantique Prussien amoureux de Capri, Ferdinand Gregorovius, et le bref mais piquant récit de voyage dans le golfe de Naples de l'impertinent Maxime du Camp. Ce sémillant écrivain français relata avec un charmant enjouement, au début de son escapade à Capri, la saine philosophie de ses braves rameurs de Sorrente :
« Ils criaient fort, maniaient allègrement leurs grands avirons et s'encourageaient entre eux.
« Allons, disaient-ils, il y là un bon monsieur qui nous donnera de quoi acheter du macaroni !'
« En somme, conclut l'ami Maxime,ils résumaient assez bien l'existence, où chacun rame de son mieux afin d'atteindre le macaroni de ses rêves. »
Le jeune Weber l'ignore encore mais le simple mot « ramer » prendra bientôt un sens prodigieux pour le reste de sa vie ...
August rêve de Capri sans la connaître, il éprouve pour l'île les tourments d'un troubadour chantant les grâces d'une Dame de légende. Bientôt sa chimère tourne à l'obsession ! Il voit les falaises d'or et de pourpre, le palais effondré de Tibère, les vagues de cristal bleu dévorant les parois fauves des falaises intangibles, et grimpe le cœur léger sur les âpres sentiers de ses montagnes !
Il y cueille en pensée une minuscule fleur d'hiver, la Blu di Capri,ou Lithodora, mêlant les plus étourdissantes nuances de bleu et qui ne s'épanouit qu'au secret des rocs les plus aigus, pareils à des épées géantes plantées au sein des flots furibonds.
Son cœur fend l'espace, son âme ouvre ses ailes,mais en bon allemand, il sait rester pratique, et se nourrit de grammaire italienne, sans oublier le dialecte Napolitain retranscrit par un bon abbé érudit. Les jours passent sans l'apaiser,l'arrogant rocher des empereurs le défie, l'Italie le nargue, Naples l'attire de façon irrésistible, il envie la liberté et la joie de vivre hors de toute raison des Lazzaroni, il ne craint ni les fureurs du Vésuve ni les épidémies, la vraie vie est là, il le sait,
A ce point de certitude, une seule chose reste à faire : partir au plus vite !
Froissé du mépris de ses compatriotes, refusant de se soumettre à sa famille, laissé sans le sou à la mort de son père, August vend ses œuvres à un brocanteur, met la main sur une boussole, fait son baluchon,oublie linge et nécessaire de toilette, et se précipite dans le train du soir qui de Munich charrie les heureux mortels vers l'Italie, là où fleurit l'oranger, et où la beauté court les rues.
Milan, Pise, Florence, Rome voient ce promeneur affamé proposer ses vues de paysage, ses dessins de monuments, ses paysannes au port de reine aux voyageurs toujours séduits par les souvenirs surtout s'ils ne leur coûtent pas grand chose.
August marche comme un soldat, éveille la compassion des paysans qui le prennent dans leurs charrettes, descend poussé par un élan passionné vers le Sud, et enfin au mois de mai de l'an mille huit cent quatre vingt, entre dans Naples . Le pauvre aventurier est ivre de fatigue, en haillons, et si maigre que des pauvres hères lui offrent de tout leur cœur une corbeille de pastèques trop mûres, invendables, mais exquises et ruisselantes d'eau, sur la belle plage de Santa Lucia.
Il réalise avec un immense plaisir que le jargon du pays n'est pas un nuage opaque, il comprend ces braves Napolitains si généreux avec un étranger aussi lamentable! Comme il a eu raison d'être déraisonnable et de s'initier aux bizarreries de cette langue « gaie, facétieuse,satirique, variée et abondante en équivoques burlesques » !
Voilà que s'avance un garnement hilare qui lui donne une bourrade sur l'épaule en lui désignant la mer. August esquisse un sourire, feint d'admirer une barque minuscule que deux autres garçons viennent de tirer sur les cailloux de lave, rend un hommage muet à la masse inquiétante du Vésuve, puis un voile couvre ses yeux, son cœur éclate dans sa poitrine... « La montagne bleue qui flotte au milieu du golfe, solitaire et voilée, serait-ce ... »
Les enfants ont compris, tous sautent sur leurs pieds, gesticulent, effarouchent les mouettes et amusent les promeneurs anglais impavides mais toujours friands de « pittoresque ».
« Capri !Timberio ! Grotta Azzura ! »
August entend Midi sonner dans le ciel transparent de Naples, mais la ville hurlante, le château de l'oeuf, le vieux -fort, la façade gracieuse du palais Royal, le désordre des quais, les marchandes d'oranges, les Lazzaroni se débarbouillant avec leur tranche de pastèque, s'effaçent, s'estompent, disparaissent, Capri l'emporte sur Naples ! Capri ancrée sur la mer, citadelle énorme et imprécise, noyée dans un nuage ondoyant... comment l'atteindre ? August retourne ses poches, et une inspiration le saisit : la barque du garnement ! Ce canot minable, c'est un signe des Dieux !
Le gamin étonné essaie de lire dans les pensées de cet étranger mort de faim ; une lueur provocante joue dans ses yeux, mais il prend le temps de plonger son visage dans une tranche de la pastèque que vient de couper en deux son frère, propriétaire de la barque qui fascine tant l'homme qui fixe Capri avec l'adoration d'un amoureux.
August se met à rire en voyant l'enfant couvert de jus comme une fontaine, et l'autre de s'écrier :
« Co tre calle, viva, mange et te lava la fascia ! »
Puis, montrant la barque d'une main et s'essuyant de l'autre, il interroge d'une voix un peu tremblante : « La barca mia, molto buonissima ! »
Soudain, les gamins se rassemblent, ils sentent que l'heure est grave ; le frère garde un silence éloquent, et le petit d'insister : « La barque, elle est parfaite, Capri , c'est si facile, il suffit de ramer, et puis c'est tout ! La nuit, les étoiles vous guident, le jour, on la voit de loin ! Alors ? Combien donnes-tu ? Et une pastèque en cadeau , et les rames bien sûr,de bonnes rames, bien solides, comme la barque, pas un trou ! Elle vient juste d'être réparée , tu ne me crois pas ? »
August comprend un mot sur trois, le petit parle à une vitesse folle ! Et ce vocabulaire lui échappe, mais tout le monde se comprend : lui, il veut cette barque, et les gamins veulent son argent, eh bien voilà ! La barque change de mains, heureusement pour sa bonne conscience de jeune Bavarois, August ne se doute pas que Tonio, l'effronté garnement des Bassi Napolitains, lui vend la barque d'un pêcheur qui vend lui-même ses langoustes à l'hôtel d'en face...
« Pronto, prontissimo, ecco ! » August et sa pastèque sont jetés dans le frêle esquif, dix gamins poussent, s'évertuent, hurlent, et s'évanouissent comme une armée en déroute. August saisit les rames et cherche Capri, pourquoi disparaît-elle sans cesse ? On dirait une vision trop belle pour appartenir au monde réel... La voilà ! Allons ! Ramons!la plage s'efface très lentement, une minuscule silhouette agite les bras, sans doute un enfant lui dit-il encore adieu , comme ils sont généreux ces petits Napolitains , pense August alors que le batelier volé emplit l'horizon de funestes malédictions ...Et vogue la galère, il faut ramer, et serrer les dents.
Le soleil en profite pour montrer sa splendeur intolérable,la mer donne le vertige de tout son azur aux profondeurs insondables, ses courtes vagues arrogantes menacent d'engloutir la barque percée, Capri s'éloigne au lieu de se rapprocher, les mouettes scandent un hymne moqueur, August écope avec la carcasse de sa pastèque, écope avec ses mains, puis se fait un abri de sa chemise déchirée.
Sa barque se meut à l'instar d'un radeau frappé par la foudre ou la colère de Poseidon, même les sirènes n'en croient pas leurs yeux ! Un homme aussi fou mérite qu'on le laisse aller à sa guise, mais où va-t-il ?
« A Capri, crie August aux éléments, je vais à Capri, esprits de l'air et des eaux, déesses marines et dieux de l'Olympe, nul ne m'empêchera de m'échouer sur ces rochers,de me fracasser au pied de ces falaises, au moins ma vie se finira-t-elle dans l'aventure,et peut-être les bras d'une sirène ... »
La nuit ranime le malheureux , les étoiles font une ronde d'honneur en hommage à sa bravoure, mais la faim, la soif, le sommeil sont des tortures qu'August ne peut plus endurer !
L'aube argente la mer, la lumière rose du matin étincelle sur les flots, mais Capri est encore si loin !
Une seconde journée s'étire dans la souffrance, nul secours ne vient des élégants en chapeau de paille et des ravissantes en ombrelle qui ricanent de ce sauvage ramant avec l'énergie d'un brigand échappé d'un bagne ! Justement une exquise créature serre très fort le bras d'un homme tuant par sa distinction : « Mais, Prince, cet olibrius, là sur ce canot qui prend l'eau, ce barbu si dégoûtant, c'est le comte de Montechristo, vous savez bien, le héros de ce livre français si drôle ! »
august n'entend pas la réponse car l'écume d'une vague étourdie lui saute à la figure. Il faut écoper, et ramer, écoper, et ramer, que disait Maxime du Camp ? Ah oui, il faut ramer jusqu'au macaroni de son rêve … La nuit glisse sans bruit sur la mer endormie , les murailles de l'île restent énormes et voilées, August ne sent plus la douleur de ses mains en sang, ses yeux sont presque aveugles, son front brûle de fièvre, mais il écope, et il rame, et voici l'aurore, une montagne d'or rouge obstrue l'horizon, portée par un courant invisible, la barque entre dans une passe écumeuse, puis, un port charmant et minuscule, une jetée de lave fait semblant de protéger les barques de pêche rouge et bleues, et les canots appartenant aux voiliers racés qui patientent au rythme de la houle, éparpillés entre les falaises levées comme d'imprenables citadelles.
Envoûté en dépit de son épuisement absolu,August lève la tête en grimaçant de douleur ; de ses yeux brûlés de lumière, il voit des vergers d'orangers, des jardins de jasmin, des tomates rouges sur des pelouses vertes, des colonnes blanches et des toits roulés comme des gâteaux, et des montagnes nimbées de lumière, et des pêcheurs qui font des signes, et une jeune fille qui entre dans l'eau et nage vers lui...
Il est à Capri et une sirène tire sa barque en miettes sur les cailloux...
Ce spectacle d'un autre âge brise la réserve hautaine d'un gentilhomme américain occupé à sa sacro sainte promenade matinale. Le colonel sudiste John Clay Mackowen, premier américain à avoir mis le pied sur la roche de l'île a un caractère impossible mais un cœur généreux.
Il observe amusé et incompréhensif les efforts de la douce Raffaela Desiderio, dont le terrible père ne tolérerait certainement pas une telle sollicitude à l'égard d'un naufragé aussi misérable !
Le colonel fronce les sourcils, que signifient maintenant les gesticulations de ces deux énergumènes ?On enlève son gentil naufragé à la belle sauveteuse, on le traîne sans égard sur la caillasse, et on le jette sur un âne comme un fardeau dont il est urgent de se débarrasser !
Intrigué, le colonel suit d'un pas nonchalant le curieux équipage.
Il n'est pas le seul !
Alerté par les sanglots de la jolie Raffaela, les femmes des pêcheurs pleurent et se lamentent, les hommes vitupèrent à plein gosier,les uns contre l'intrus sauvé des flots, les autres contre la maréchaussée qui déploie un zèle intempestif.
Toute cette foule se masse devant l'entrée de l'unique cachot de Capri, Le colonel voudrait bien rester impavide ainsi qu'il sied à un noble et hautain étranger ...mais sa curiosité l'emporte sur sa position d'homme du monde ! tant pis, il doit tirer cette affaire au clair, on ne sait jamais, le naufragé ressemble à Ulysse, peut-être à son instar, se fera-t-il reconnaître comme un homme civilisé par son langage ou ses bonnes manières... et s'il s'agissait d'un prince excentrique ?
Tout est possible à Capri !
Le colonel attaque d'emblée en anglais, A son vif étonnement, le naufragé se redresse de dessus son âne ! et il répond avec la plus gracieuse courtoisie ! C'est d'un effet si comique que l'on croit assister à un spectacle de rue !
Les îliens éclatent de rire, les carabiniers sont vexés et tirent sur leurs moustaches, l'âne en profite pour ruer, le naufragé s'étale aux pieds de Raffaela, et le colonel le ramasse en lui ordonnant de décliner son identité au plus vite.
« Affaire de vie ou de mort, mon garçon, avec votre barbe de galérien, ces deux crétins ne vous lâcheront pas si vous ne prouvez pas que vous n'êtes pas échappé de la prison de Nisida ! »
August tient à peine sur ses jambes, mais il esquisse un salut sentant l'homme bien élevé, et haussant le ton, plaide sa cause dans un italien si précieux que nul, excepté le colonel, ne le comprend ! Toutefois, cela ne fait rien, l''essentiel est là : les carabiniers ont saisi que le mendiant était bel et bien un Monsieur !
Mackowen sèche les larmes de la belle Raffaela, prend le bras du vagabond du golfe de Naples et l'invite à déjeuner dans sa maison du port, avant de lui louer une chambre, justement chez le père aubergiste de la sirène improvisée …
A cette époque romantique, les excentriques en exil sur le divin rocher s'aidaient à vivre leurs rêves Capriote., l'histoire d'August Weber prit ainsi un tour de conte de fée, car, après avoir réussi non sans mal à épouser Raffela, August fonda une pension de famille sur le sable de la crique de Marina Piccola, au-dessus de l'antique Scoglio delle Sirene, roc romantique non loin des gigantesques îlots des Faraglioni. Notre ami ne sacrifia pas ce rocher consacré depuis la nuit des temps, il respecta sa vocation de relais de sel et de refuge des divinités ; il rendit hommage aux sirènes, recluses au fond des grottes, sous les eaux de pur saphir, de grenat liquide ou d'émeraude transparente.
Hélas, encore une fois, hélas, le rocher fut bien plus tard, éventré, enlaidi, martyrisé ...
Ses vestiges encore harmonieux, ornés d'arches anciennes, sont laissés avec dédain aux simples mortels qui s'y entassent pour rien, ce qui est fort rare, à l'ombre des Bains de Mer ruineux . Les sirènes ont fui devant ces « plages » de ciment dévolues aux touristes cossus, incapables de se passer d'un luxe que l'écrasante beauté de l'île rendra toujours inutile …
Au fil de sa conquête par un nouveau style de voyageurs, Capri a perdu beaucoup de sa majesté sublime, surtout sur Marina Piccola, et de son hospitalité antique et légendaire.
Que diraient Weber, et Mackowen ? Mieux vaut ne pas l'imaginer...(Mackowen célèbre pour sa langue acérée, serait particulièrement éloquent.. lui qui bâtit la Cassa Rossa, extravagant monument d'Anacapri, une histoire que je vous raconterai bientôt.)
A la Belle Epoque, la pension Weber fut-elle un hôtel de plus à Capri ? Que non pas ! un mythe !
Ragaillardis par la verve fantaisiste et la gentillesse de l'hôte, qui leur inventait des dictons lapidaires :
« Epargnez le sang des poussins !
Buvez le sang des raisins !»
et d'autres encore plus farfelus, les voyageurs blasés et ennuyés se sentirent rafraîchis et réconfortés, parfois même sans bourse délier si leur hôte les estimait selon son cœur ...La réputation de l'extravagant August vola sur l'Europe entière, et l'humble hôtel grignota, hélas, la falaise au point de se métamorphoser en séjour très prisé : l'incomparable hôtel Ambassador Weber, lieu de perfection ne gardant plus trace du naufragé barbu qui rama jadis jusqu'à Capri !
Si ce n'est le portrait éternel des deux époux qui vainquirent l'hostilité de leurs familles pour un bon mariage, s'il ne fut délicieux ...
Or, Capri a toujours le dernier mot !
La vérité, c'est que par les tempêtueuses nuits de janvier, August,dévale, alerte et joyeux, les escaliers de Marina Piccola,et court sur la plage rendue à sa liberté sauvage, à sa beauté surnaturelle, tandis qu'au sein de l'écume bleue glissent les farouches et redoutables filles des eaux profondes, les sirènes aux yeux verts, aux corps de jasmin blanc...
Ramons vers l'île ou le pays de nos rêves ! ne nous décourageons jamais !
A bientôt,
Nathalie-Alix de La Panouse ou Lady Alix
Le pêcheur et la sirène 1858 Frederick Leighton Bristol City Museum |
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